Bonjour / bonsoir et bienvenue à toutes et à tous pour ce nouveau numéro de La Quinte Juste. Jusqu’à maintenant les histoires que l’on a étudié étaient toutes relativement tout public, bien que l’on ait eu à faire à des bizarreries comme The Lamb Lies Down on Broadway ou Philippe Katerine, globalement cela restait plutôt soft. Du coup je pense qu’il est temps de changer cela, et de partir sur un album concept dont le récit est plutôt violent et glauque, voire de mauvais goût ; parce qu’après tout, nous sommes tous un peu masochistes non ? …non ?
Frances the Mute est un album concept de rock expérimental sorti en 2005, et il s’agit du deuxième album de The Mars Volta. L’album eut des scores très élevés, et fut globalement très bien reçu par cette communauté de gens bizarres que sont les fans d’expérimental et d’avant-garde. Les paroles sont très compliquées à suivre, puisqu’elles sont écrites tantôt en anglais, tantôt en espagnol, qui plus est le parolier et chanteur Omar Rodríguez-López aime beaucoup utiliser des mots peu communs. Ce dernier refuse également de divulguer beaucoup d’informations sur le récit ; autant vous dire qu’il est difficile de raconter l’histoire de Frances the Mute, d’autant plus que certains avis divergent. Je vais donc faire un petit disclaimer : l’histoire que je vais vous raconter ici n’est pas la version officielle, il s’agit d’un consensus de plusieurs musicologues sur une version possible du récit.
Le concept de Frances the Mute serait inspiré d’un journal intime anonyme, retrouvé par le groupe. Chacune des pièces de l’album représente un personnage et raconte son histoire. La première pièce raconte l’histoire du protagoniste appelé Vismund Cygnus, le gérant d’un bordel atteint du SIDA (une personne intelligente donc), avec probablement des problèmes de drogue et d’alcool. Il est né suite à un viol, et décide de partir à la recherche de sa mère Frances, une prostituée muette, également drogue addict, qui fut supposément violée par des prêtres corrompus qui profitaient de leur statut social.
Dans la deuxième pièce est introduit le personnage de la Veuve, une femme seule qui coucha de nombreuses fois avec Cygnus, sans protection, jusqu’à en devenir dépendante. La vieille femme finit évidemment par attraper le SIDA à cause de cela, et en mourut assez rapidement, bien que son décès ne semblait pas trop perturber notre protagoniste.
La troisième pièce raconte la rencontre de Cygnus et de sa tante L’via, qui aurait assisté au viol de sa soeur et à la naissance de son fils. Morte de peur, elle vivait cachée de l’Eglise et des prêtres corrompus, qui s’ils la trouvaient la tueraient probablement, afin d’éliminer les témoins. L’via raconta sa version des faits à Cygnus, et pour la remercier il jura de la protéger de ses ennemis. Cependant, c’est à travers notre héros que les prêtres finirent par retrouver la trace de L’via, et Cygnus la retrouva plus tard violée et tuée au détour d’une ruelle. La mort de sa tante le perturba tellement qu’il décida de la venger coûte que coûte, alors qu’il commençait petit à petit à devenir fou.
Grâce aux informations de L’via, Cygnus parvint à rencontrer sa grand-mère, Miranda, qui connaît la vérité. Dans la quatrième pièce, Miranda explique qu’elle raconta son histoire à beaucoup de monde, mais que personne n’osait l’aider, par peur des représailles de l’Eglise. Miranda révéla à Cygnus que sa mère Frances était probablement hébergée par l’Eglise à cause de son handicap, puis qu’elle fut violée par les prêtres, et que son fils, Cygnus lui-même, lui fut enlevé et élevé dans un orphelinat. Miranda raconta pour finir que récemment Frances eût été retrouvée décédée du SIDA, et Cygnus comprit que la Veuve avec qui il couchait régulièrement était en réalité sa mère… Il avait donc tué sans le vouloir sa propre mère, après avoir couché avec. Je vous avais prévenu que ça allait être glauque.
La dernière pièce fait débat chez les musicologues. Elle raconte l’histoire d’un personnage appelé Cassandra Gemini, qui serait supposément Cygnus lui-même, ou en tout cas une version démente du personnage qui tombe peu à peu dans la folie. Cassandra, assoiffée de sang et de vengeance, se mit à tuer et à violer (dans cet ordre) 25 femmes, persuadée de venger sa mère et sa tante, alors qu’en vérité Cygnus les avait tué toutes les deux. Ce dernier finit par mourir d’une overdose à la fin de l’album, et les prêtres l’emportent.
Comme vous avez pu le voir, l’histoire de Frances the Mute est très complexe, à la fois à lire et à raconter. Eh bien, la musique et les paroles sont à l’image du récit, puisque tous deux sont également difficile à écouter.
Comme je l’avais dit dans l’introduction, les paroles sont tantôt écrites en anglais, tantôt en espagnol, ce qui perturbe déjà la compréhension de l’histoire, et en même temps permet d’enrichir les sonorités de l’album.
La musique cependant peut paraître difficile à la première écoute. En effet, l’album nécessite une certaine “préparation”, une accoutumance à ce genre de musique, et de multiples écoutes, avant d’être complètement apprécié. En effet, le public visé est très réduit ce qui est un peu dommage, mais quand l’on finit par comprendre la musique, on finit également par l’apprécier, et on s’aperçoit du talent des musiciens, et surtout du compositeur.
Par rapport au récit, on se retrouve confronté encore une fois à l’éternel problème des albums concepts concernant les personnages, à savoir le fait qu’ils soient tous chantés par la même personne, ce qui rend la compréhension délicate. Heureusement que les titres des pièces sont là pour nous guider. En revanche, la musique supporte très bien le récit, dans sa construction et sa sonorité.
Comme d’habitude, je vais mettre un lien vers l’album, mais je vous conseillerai de prendre vraiment le temps de vous concentrer sur ce que vous écoutez, afin d’apprécier cet album qui en réalité est vraiment très beau, bien que difficile d’accès. Laissez-lui le temps, vous ne serez pas déçus.
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