Bonjour / bonsoir et bienvenue à toutes et à tous pour ce nouveau numéro de La Quinte Juste. Eh oui, déjà le numéro 20 de cette chronique… je vous avouerai que pour moi c’est passé très vite. Pour ce numéro, j’ai décidé de faire quelque chose de spécial, puisque je ne vais pas vraiment vous présenter un album à proprement parler, mais d’une suite un peu particulière. En art, une suite est un ensemble d’œuvres que l’on considère liées, ou faisant partie d’une unique œuvre, plus importante et plus grande ; en l’occurrence, ici nous allons parler de plusieurs pièces qui forment la Twelve Step Suite de Dream Theater.
La Twelve Step Suite est une œuvre d’une durée de 55 minutes environ, en douze mouvements, et formée de cinq pièces distinctes. Le contexte d’écriture de la suite est d’ailleurs très intéressant : l’ancien batteur du groupe, Mike Portnoy, avait quelques soucis avec l’alcool qui commençaient à devenir problématiques. Il suivit donc un de ces programmes en douze étapes qui permettent de se libérer de son addiction, et cela l’a beaucoup aidé ; à tel point qu’il décida d’en écrire une suite en douze mouvements, représentant ces douze étapes.
En 2002, pendant l’écriture du sixième album du groupe, Mike Portnoy décida qu’il écrirait et enregistrerait une pièce par album : la première est donc parue en 2002, la seconde sur l’album suivant en 2003, et ainsi de suite jusqu’en 2009, où la cinquième et dernière pièce de la suite fut terminée. Il est intéressant de noter que chacune de ces pièces sont dédicacées à “Bill W. et tous ses amis”, ce sont les personnes qui ont soutenues Portnoy tout au long de sa thérapie.
La suite s’ouvre avec la pièce The Glass Prison, la prison de verre, une métaphore qui représente la bouteille d’alcool, et par extension, l’addiction semblable à un emprisonnement. Dans cette pièce, le protagoniste (supposément Mike Portnoy lui-même) se laisse abattre, pensant qu’il ne pourra jamais se libérer de sa prison de verre. Un homme vient lui tendre alors la main, lui disant qu’il peut l’aider à sortir, et que la première étape est de trouver la volonté de se libérer. La seconde pièce, This dying soul, décrit le passé du protagoniste, et le force à replonger dans ses pensées pour tenter de découvrir qui il est vraiment. Le thérapeute lui fait alors reconnaître qu’il est fautif dans ses actions, mais qu’il est capable d’évoluer. Dans la troisième pièce, The Root of All Evil, le protagoniste est enfin prêt à accepter ses torts. Il lutte de toutes ses forces pour stopper son addiction, et il finit par y parvenir. Repentance, la pièce suivante, illustre les repentirs du protagoniste. Ce dernier, après avoir reconnu ses torts, doit se pardonner à lui-même pour continuer à vivre. Enfin, dans le grand final, The shattered fortress, notre protagoniste est complètement guéri, et annonce qu’il désire à son tour venir en aide à ceux qui en auraient besoin. Il est à noter que le titre de cette dernière pièce (La forteresse brisée, “shattered” s’utilise pour des éclats de verre notamment), reprend la métaphore de la première, mais cette fois la bouteille est enfin détruite, la prison de verre est brisée.
Chacune des pièces sont intégralement écrites par Mike Portnoy lui-même, avec l’aide ponctuelle des autres membres du groupe ; et elles sont donc la preuve du talent immense du batteur, que ce soit en matière de composition, d’interprétation, ou d’écriture. Musicalement et structurellement, la Twelve Step Suite est tellement riche qu’on pourrait écrire tout une encyclopédie à son sujet. Je vais donc tâcher de synthétiser au maximum. On peut remarquer par exemple que, bien que chacune des pièces soit séparées de plusieurs années, on retrouve les mêmes thèmes musicaux ; cela est particulièrement remarquable dans la dernière pièce : le thème principal des pièces précédentes apparaissent un à un au moins une fois, plus ou moins dans un ordre chronologique inverse, mais avec des paroles changeantes pour illustrer la libération plutôt que l’emprisonnement. On notera aussi que la Twelve step suite est symétrique, puisque le thème et les bruitages du début sont repris à l’identique à la fin de la suite, formant ainsi une mise en abîme.
Chacune des pièces composant la suite dispose de ses propres thématiques, mais l’on peut remarquer qu’elles sont toutes très dynamiques et agressives, sauf la quatrième qui à l’inverse est très calme, et contraste complètement avec le reste. Qui plus est, plusieurs musiciens ont été invité à prononcer un texte dans cette pièce (notamment Steve Vai <3), dans lequel ils confessent chacun leur tour des regrets qu’ils ont pu avoir.
En soit, la Twelve Step Suite est un véritable chef d’œuvre en bien des niveaux, et je vous invite très fortement à l’écouter dans l’ordre. Vous pouvez bien évidemment écouter chacun des albums dans lesquels les morceaux sont présents, mais les écouter à la suite permet vraiment de soulever la grandeur de l’œuvre, et je vous invite à le faire ici :
Laisser un commentaire